Jean-Laurent Bonnafé, son directeur général, détaille dans un entretien aux « Echos » les derniers engagements de la banque française. Il défend une approche déterminée, mais progressive.
Les banques sont en première ligne pour accélérer la transition énergétique. BNP Paribas, le premier établissement de la zone euro avec ses 2.000 milliards d'euros de bilan, entend en prendre toute sa part.
« La COP21 est un moment de bascule pour l'ensemble de l'industrie, explique Jean-Laurent Bonnafé, son directeur général, dans un entretien aux Echos. Depuis 2015, nous consacrons énormément de temps à tous les sujets qui touchent la transition énergétique lors de nos comités de directions. Nous les intégrons dans notre plan stratégique comme une dimension importante, sinon essentielle. Et nous faisons en sorte de les décliner dans tous nos métiers, en adaptant la manière dont nous travaillons et en nous adressant à l'ensemble de nos clients : grandes entreprises, investisseurs institutionnels, particuliers... »
Nouvelles mesures
Le Groupe a ainsi pris des mesures pour se tenir à distance des énergies les plus polluantes. Il s'est engagé à ne plus financer le gaz et le pétrole de schiste, le pétrole issu des sables bitumineux ou celui qui est foré en Arctique. Cela veut dire par exemple qu'il renonce à financer le terminal d'exportation de gaz de schiste Texas LNG aux Etats-Unis. Ces mesures s’ajoutent à la décision de réduire son soutien au secteur du charbon (mines et centrales), de porter ses financements dans les énergies renouvelables à 15 Mds€ en 2020, et de consacrer 100M€ à l’investissement dans des start-up qui innovent en faveur de la transition énergétique.
« Ce sont les décisions les plus évidentes, mais pas les plus faciles à prendre. Cela a un impact sur nos équipes et nos revenus, mais on l'assume. Il est essentiel de se détourner des acteurs qui tournent le dos au changement climatique, et d'accompagner ceux qui sont en mouvement. Sachant que cela ne peut être fait que dans une logique de progressivité : tout le monde ne peut pas mener cette transition énergétique au même rythme », explique Jean-Laurent Bonnafé. BNP Paribas ne soutient que les producteurs d'électricité qui ont une stratégie de réduction de la part du charbon dans leur « mix ».
Il est essentiel de se détourner des acteurs qui tournent le dos au changement climatique, et d'accompagner ceux qui sont en mouvement.
Le Groupe a aussi doublé son objectif de financement des énergies renouvelables à hauteur de 15 milliards d'euros en 2020. « Mais nous irons sans doute jusqu'à 20 milliards, prévient le directeur général. Nous allons aussi investir 100 millions dans start-up spécialisées dans la transition énergétique, dans les domaines du stockage ou de l'efficacité énergétique par exemple. La transition vers l'éolien ou le solaire est indispensable, mais elle ne suffira pas. Il nous faut imaginer d'autres approches, dans toutes les directions possibles, pour être compatibles avec les objectifs de l'accord de Paris ».
Le Groupe a ouvert ses financements verts aux particuliers, en proposant un prêt à 1 % pour l'achat d'un véhicule neuf bénéficiant du bonus écologique. Sa filiale de gestion BNP Paribas Asset Management va lancer un fonds d'épargne pour financer les PME européennes actives sur la transition énergétique.
Une vague puissante
Le Groupe va par ailleurs rejoindre la « Breakthrough Energy Coalition », qui soutient l'innovation en faveur du développement des énergies propres. Il va créer avec la fondation Gates le programme « One Planet Fellowship », doté de 15 millions de dollars sur cinq ans, pour soutenir la recherche sur l'adaptation au changement climatique en Afrique.
« La vague est extrêmement puissante, personne ne peut l'ignorer. Les banques peuvent jouer un effet démultiplicateur dans la construction de l'économie bas carbone. Elles doivent s'engager pleinement dans cette transition en demandant à leurs clients des efforts soutenables et progressifs. Des efforts qui sont à leur portée, sinon vous risquez de faire plonger dans le rouge des économies entières. Il nous faut notamment tendre la main aux pays émergents qui sont dans une équation plus difficile », conclut Jean-Laurent Bonnafé.
Les banques peuvent jouer un effet démultiplicateur dans la construction de l'économie bas carbone.
Guillaume de Maujean, Les Echos, le 12.12.2017