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Aux côtés des femmes entrepreneures dans les pays émergents

Les femmes parviennent peu à peu à conquérir la place qu’elles méritent dans l’économie des pays en développement. Mais elles pourraient avoir un impact encore plus significatif sur l’activité et la croissance de leur pays : aider les femmes entrepreneures, en particulier dans les pays émergents, c’est aider tout un pays. Quelles sont les actions de BNP Paribas en la matière ? Avec quels résultats ?

Alain Lévy, vous êtes Responsable Microfinance et Entrepreneuriat Social pour l’Amérique et l’Asie chez BNP Paribas. Comment le Groupe aide-t-il les femmes entrepreneures dans les pays émergents ? 

Principalement à travers le financement d’institutions de microcrédit qui, elles, financent les emprunteurs à faible ressource. Dans cet objectif de favoriser l’accès au crédit de populations qui ne disposent pas d’actifs, les femmes sont en première ligne, essentiellement parce que l’environnement local (milieu rural, spécificités culturelles, inégalité d’accès à l’éducation) les tient plus éloignées que les hommes des circuits traditionnels de financement.

 Il faut dire également que la plupart des acteurs de la microfinance considèrent que les femmes sont des emprunteurs plus fiables, avec un bien meilleur taux de remboursement que les hommes. Résultat, en finançant le microcrédit dans les pays émergents, nous favorisons de fait l’insertion des femmes dans le tissu économique.

“ prêter aux femmes leur apporte plus que de l’argent : ces microcrédits accélèrent leur émancipation dans le foyer, développent leur estime de soi, améliorent leur rôle familial et social. ”

Alain Lévy

Responsable Microfinance et Entrepreneuriat Social pour l’Amérique et l’Asie chez BNP Paribas

Quelle proportion des micro-emprunteurs représentent-elles ? 

Cela dépend des pays et des institutions de microfinance qui y travaillent. Globalement, le nombre de femmes financées évolue avec le développement de ces institutions. En Inde, les femmes représentent 99,8 % des entrepreneures financés, en Indonésie 100 %, en Chine 90 %, en Colombie 62 %, en Tunisie 64 %, au Maroc 45 %... Au global, sur notre portefeuille « pays émergents », elles sont 90 %, contre 50 % dans les pays plus développés.

Business ou philanthropie ?

Chez BNP Paribas, les activités de microfinance sont intégrées dans le département RSE (responsabilité sociale et environnementale) du Groupe. Ce qui signifie que nous les considérons comme un « social business » : d’une part, c’est une réelle activité bancaire qui doit a minima couvrir ses coûts et dans tous les cas être gérée de manière pérenne, avec des perspectives de développement. Ce n’est donc pas de la philanthropie mais des engagements de crédits avec des risques à la clef.

D’autre part, la finalité est d’aider à l’amélioration des conditions de vie ; nous n’apportons donc pas de financement si la performance sociale ne peut être prouvée. Nous avons à ce sujet des critères RSE très clairs, qui sont prioritaires sur la croissance des encours. D’ailleurs, l’augmentation du nombre de bénéficiaires de microcrédits octroyés par les institutions que nous finançons fait partie des indicateurs RSE sur lesquels une partie de la rémunération variable des dirigeants est indexée.

la finalité est d’aider à l’amélioration des conditions de vie.

En fait, la microfinance ne peut pas être décorrélée de la performance sociale, sans quoi elle devient une activité économique « classique ».

Vous leur apportez des fonds, mais ne faut-il pas faire bouger les lignes plus en amont ?

C’est indéniable, et en l’occurrence, prêter aux femmes leur apporte plus que de l’argent : ces microcrédits accélèrent leur émancipation dans le foyer, développent leur estime de soi, améliorent leur rôle familial et social.

Les modèles d’accompagnement dépendent de chaque institution de microcrédit en fonction de sa philosophie et de son degré de maturité, mais dans la plupart des cas les femmes reçoivent aussi un minimum d’éducation financière (fonctionnement d’un crédit, notion de surendettement…) ainsi que, parfois, un accès à des soins ou des écoles dédiées.

 Certaines institutions insistent aussi sur les bienfaits du microcrédit de groupe sur le tissu social, par exemple en octroyant des prêts, dans lesquels quatre à cinq femmes sont solidaires financièrement, ce qui crée entre elles des liens très forts. Je pense également à cette ONG de Calcutta qui recense régulièrement les besoins de ses membres et fait de la mise en relation entre clients et fournisseurs.

Les fonds servent-ils plutôt à lancer l'activité, ou à la développer ?

On parle de pays dans lesquels il est assez facile de commencer une activité ; par conséquent, les institutions commencent par prêter dans ce cadre : une activité informelle et peu capitalistique – restaurant de rue, fabrication de saris, agriculture paysanne.

Ensuite, en fonction de critères propres à l’institution de microcrédit, il existe des paliers d’augmentation des montants prêtés. Le recours à ces paliers va dépendre de l’ambition de chaque femme : certaines lancent leur projet et s’arrêtent là, tandis que d’autres n’arrêtent plus de se développer.

 Par exemple, une femme Sud-Africaine à qui une IMF avait accordé un premier prêt pour acheter des vaches, en a contracté un deuxième pour l’acquisition d’une fourgonnette, puis elle a eu l’idée d’un service de transport en bus entre les villages environnants ; aujourd’hui son activité dispose de 4 cars ! De la même façon, nous avons financé une Indonésienne qui achetait des crabes pour les revendre et avait besoin de fonds pour acheter plus de crabes, puis elle nous a sollicités pour acquérir son propre bateau de pêche, ensuite un deuxième bateau, un troisième, et finalement elle a construit une petite usine pour conditionner le produit de sa pêche en conserves…

 Bien évidemment, ces femmes avaient déjà le sens des affaires, la microfinance n’a servi que de révélateur de compétences !

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