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Du capital aux kilowatts : perspectives régionales des énergies renouvelables

Publié Aujourd'hui

À mesure que les marchés énergétiques se développent et évoluent, la finance joue un rôle dans la gestion des risques et l’orientation des capitaux afin de favoriser la croissance des énergies renouvelables à l’échelle mondiale.

Entretien avec nos experts du Low Carbon Transition Group

Ravina Advani, Head of the Low Carbon Transition Group in the Americas region, Head of Energy Natural Resources and Renewables Coverage in North America.  

Rachid Bouhamidi, Head of Power and Renewables Debt Advisory and Financing, Europe, Middle East and Africa (EMEA).

Shalen Shivpuri, Head of Energy, Resources and Infrastructure in Asia Pacific (APAC).  

Comment le secteur financier peut-il soutenir la demande globale en énergie ?

Les dernières données du Global Energy Review de l’Agence internationale de l’énergie (AIE) indiquent que la demande mondiale en énergie a augmenté à un rythme supérieur à la moyenne en 2024. En particulier, la demande en électricité a augmenté presque deux fois plus vite que la demande globale en énergie, en raison de la hausse des besoins en climatisation, de l’augmentation de la consommation du secteur industriel, de l’électrification des transports et de la croissance des centres de données et de l’intelligence artificielle.

Les énergies renouvelables jouant un rôle de plus en plus important pour répondre à cette demande croissante, nous avons interrogé les experts du Low Carbon Transition Group de BNP Paribas dans trois régions afin de mieux comprendre les tendances à long terme sur leurs marchés respectifs et d’examiner comment le secteur financier peut soutenir cette évolution.

Asie-Pacifique : un marché dynamique et un environnement diversifié

Réglementations, devises, conditions du marché : le secteur des énergies renouvelables en Asie-Pacifique est très varié à bien des égards. Les pays les plus petits, comme le Japon, la Corée et Taïwan, se concentrent sur les projets éoliens en mer, tandis que l’Australie et l’Inde misent sur l’énergie solaire et l’éolien terrestre en raison de leurs vastes territoires.

Alors que la région connaît une augmentation significative de ses besoins en électricité, avec une hausse de 6 % prévue en 2024 (source AIE en anglais), et que la Chine et l’Inde sont en tête en termes de demande et d’expansion des capacités d’énergie propre, Shalen Shivpuri examine les différentes stratégies d’expansion des énergies renouvelables dans la région Asie-Pacifique (APAC) et la manière dont celles-ci se reflètent dans les stratégies de financement.

« Les énergies renouvelables représentaient environ 34 % du mix énergétique de la Chine et 20 % de celui de l’Inde l’année dernière. Au cours du premier semestre 2025, la production d’énergie solaire en Chine a connu une croissance de 45 % et la part des sources à faibles émissions dans le mix énergétique a dépassé 40 %. Ce boom a été alimenté par des secteurs comme ceux de la fabrication de panneaux solaires, des batteries, des véhicules électriques, des centres de données et des réseaux 5G. »

Les caractéristique uniques de la région APAC

Shalen Shivpuri souligne les caractéristiques uniques de la région, par rapport aux marchés plus uniformes des États-Unis et de la zone EMEA : « Une caractéristique très spécifique de la région est l’importance des taux de change et des coûts de couverture. Cela signifie que les clients doivent s’orienter entre les pools de liquidités locaux et les marchés de capitaux pour trouver les options de financement les plus rentables, tout en surveillant les coûts au débarquement et les dépenses de couverture dans différentes devises locales. »

Il est donc essentiel de pouvoir compter sur un partenaire bancaire fiable. Shalen Shivpuri poursuit : « Chez BNP Paribas, notre objectif est d’aider nos clients internationaux à déployer efficacement leurs projets, en s’appuyant sur notre solide expertise mondiale et notre connaissance approfondie du marché local. »

Dans un environnement de marché complexe, il est essentiel de bien connaître l’ensemble de la chaîne de valeur : « Nous accompagnons nos clients tout au long de la chaîne. Les promoteurs lancent généralement leurs projets avec un simple financement dans un premier temps, puis passent au marché obligataire, ce qui leur facilite l’accès à différents pools de liquidités, notamment les marchés de capitaux, les banques commerciales et les marchés du carbone. »

EMEA : La modernisation du réseau sera une priorité essentielle

La part des énergies renouvelables dans le mix énergétique augmente également dans la région EMEA. Selon l’Agence internationale de l’énergie, leur proportion dans l’approvisionnement énergétique de l’Union européenne passera de 48 % à 56 % d’ici 2027. Cette croissance est un levier essentiel dans la transition actuelle vers l’électrification des économies et un élément clé de la transition plus large vers une économie à faible émission de carbone.  

Rachid Bouhamidi souligne les différents défis à relever pour garantir une production et une utilisation efficaces de la part croissante des énergies renouvelables dans le mix énergétique.

Les projets d’énergie éolienne offshore constituent un élément crucial de la stratégie énergétique européenne, avec des projets importants en cours au Royaume-Uni, en France, en Pologne, en Allemagne et dans les pays nordiques en particulier. Ces projets nécessitent une expertise et des investissements importants pour gérer les risques, en particulier ceux liés à la construction. Les projets solaires et éoliens terrestres peuvent nécessiter des dépenses d’investissement par mégawatt moins élevées, mais leur développement peut être ralenti par le processus d’obtention des permis. Dans ce contexte, un cadre réglementaire clair, favorable et stable pour les énergies renouvelables est d’une importance capitale pour maintenir le rythme des investissements et atteindre l’objectif de neutralité carbone. 

Des investissements essentiels pour la sécurité et la compétitivité de l'Europe

Étant donné que les énergies renouvelables représentent une part croissante du mix énergétique, l’une des principales priorités des années à venir sera la modernisation du réseau électrique. Les investissements dans le réseau seront essentiels pour la sécurité et la compétitivité futures de l’Europe.

« Plus de 1 700 gigawatts (GW) de projets d’énergie renouvelable dans 16 pays attendent d’être raccordés au réseau électrique, tandis que, dans le même temps, la réduction de la production d’énergie renouvelable devient un thème récurrent dans toute l’Europe en raison des contraintes du réseau ou d’un déséquilibre temporaire entre l’offre et la demande d’électricité. Une nouvelle approche de fonctionnement systémique et davantage d’investissements dans les infrastructures de stockage d’énergie sont nécessaires pour soutenir un système électrique plus flexible et résilient. »

Rachid Bouhamidi souligne : « Les résultats de la première enchère italienne sur le stockage par batterie, MACSE (Mécanisme d’Approvisionnement en Capacité de Stockage Électrique), démontrent que ce type d’investissement peut être réalisé par le secteur privé à des conditions très concurrentielles. »

Les énergies renouvelables sont devenues une classe d’actifs bien établie et très recherchée par les investisseurs institutionnels et les grandes entreprises : « Les banques jouent un rôle clé dans l’accompagnement des clients tout au long du processus d’investissement, qu’il s’agisse de fournir des conseils financiers, des prêts, des produits de gestion des risques (par exemple, des instruments de couverture contre les risques d’inflation et de taux d’intérêt) ou de présenter des projets aux marchés financiers internationaux. Notre collaboration avec la Banque européenne d’investissement (BEI) en vue de soutenir des projets d’énergie éolienne au sein de l’UE dans le but de stimuler les investissements, d’améliorer l’efficacité de la chaîne d’approvisionnement et les interconnexions entre les réseaux en est un exemple notable. »

Amériques : développer des solutions de financement innovantes

Au cours de la dernière décennie, les entreprises énergétiques des Amériques ont constamment développé leurs capacités en matière d’énergies renouvelables. Malgré un changement marqué du cadre réglementaire des États-Unis au cours des derniers mois, les fondamentaux du marché continuent de soutenir la croissance du marché de la transition vers une économie à faible émission de carbone. L’électrification, l’essor de l’IA, l’industrie manufacturière et la poursuite de la construction de centres de données continuent de stimuler la demande en énergie, qui devrait atteindre de nouveaux pics à l’instar d’autres régions du monde.

La région Amériques a connu une hausse de 2,2 % de la demande d’électricité en 2024, le Brésil, les États-Unis et le Canada en tête. La production d’énergie renouvelable se développe pour répondre à une grande partie de cette demande, en particulier l’énergie solaire et éolienne. 
Ravina Advani

Ravina Advani souligne les nouveaux défis que présente cette situation. Alors que le vieillissement du réseau et les goulets d’étranglement dans le transport continuent de mettre à l’épreuve la capacité du marché à augmenter l’offre, la question du « speed-to-power », à savoir l’accélération de la mise en service de nouvelles capacités de production, devient de plus en plus cruciale. La croissance sans précédent de la charge a mis en évidence l’importance d’une production « dispatchable » (distribuable). 

Le captage et le stockage de carbone

Cela a pour conséquence de stimuler la dynamique continue du stockage d'énergie, ainsi que la reprise de la production d'électricité à partir du gaz naturel. Alors que les centres de données mettent de plus en plus à rude épreuve la fiabilité du réseau et que la décarbonisation est devenue une priorité, le nucléaire, en particulier la technologie des petits réacteurs modulaires (SMR), s’est également imposé comme une solution énergétique convaincante, capable de produire de l’électricité dite « dispatchable » 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. Le captage et la séquestration du carbone (CSC) s’imposent de plus en plus comme une solution de décarbonisation bénéficiant d’un large soutien.

Malgré les obstacles liés aux droits de douane et à l’évolution du cadre réglementaire, les énergies renouvelables continuent d’offrir des solutions parmi les plus rapides à mettre en œuvre.

« Des solutions financières innovantes voient le jour, les investisseurs privés s’intéressant de plus en plus aux projets à faible émission de carbone. Cet intérêt croissant des investisseurs privés fait croître les liquidités pour les projets liés aux énergies renouvelables. »

Ravina Advani explique : « Cette collaboration améliore non seulement la disponibilité des fonds, mais renforce également l’écosystème financier global qui soutient les initiatives en matière d’énergies renouvelables. » Au fur et à mesure de l’évolution du secteur, de nombreuses structures uniques ont vu le jour, les investisseurs privés se concentrant davantage sur la transition vers une économie à faible intensité carbone. Ravina Advani poursuit : « Des capitaux importants sont investis dans ces projets renouvelables, ce qui en dit long sur l’intérêt suscité par cette classe d’actifs. Et surtout, cela favorise véritablement l’innovation, comme nous l’avons vu  avec différentes technologies. »

Le 'Low Carbon Transition Group' de BNP Paribas

BNP Paribas a créé le Low Carbon Transition Group (LCTG) en 2021. Il s’agit d’une plateforme mondiale qui rassemble un écosystème d’environ 250 banquiers à travers le monde. Le LCTG couvre tous les produits bancaires d’investissement, y compris les fusions-acquisitions, le conseil stratégique, la levée de fonds et le financement, et s’ouvre également à l’ensemble des solutions proposées par BNP Paribas.

Il fournit des conseils sur mesure et des solutions de capital optimales pour chaque situation, dans le but de soutenir une décarbonisation efficace de l’économie, en particulier dans les secteurs de l’énergie, de la mobilité et de l’industrie. Le Groupe développe ainsi une expertise multidimensionnelle pour soutenir le développement des énergies renouvelables, le nucléaire, ainsi que de nouvelles chaînes de valeur telles que les batteries, l’hydrogène vert et les carburants à faible teneur en carbone ainsi que la séquestration du CO2.

Découvrez le Low Carbon Transition Group

Cet article est une traduction de l'article : From capital to kilowatts: regional insights on renewables

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