Les banques centrales en Asie peuvent-elles soutenir la baisse de taux pour rétablir la dynamique économique ?
L'une des principales questions concernant les perspectives économiques de l'Asie à l'horizon 2025 est de savoir si les banques centrales de la région peuvent soutenir avec succès le cycle actuel de baisses de taux pour rétablir la dynamique économique. La faiblesse de la demande intérieure, les perturbations potentielles du commerce mondial et la marge limitée de relance budgétaire font de l’assouplissement des politiques monétaires une option attrayante pour les décideurs économiques.
Cependant, la décision de baisser davantage les taux sera compliquée par un environnement extérieur difficile. Le dollar devrait rester fort tout au long de l'année. De plus, la Réserve fédérale américaine a mis en pause son propre cycle de réduction des taux. Le risque d'un élargissement des écarts de taux d'intérêt avec les États-Unis limite les possibilités d'assouplissement de la politique monétaire en Asie.
Des amplitudes selon la situation particulière de chaque économie en Asie
Malgré ce contexte, nous nous attendons à ce que la plupart des banques centrales asiatiques baissent leurs taux deux ou trois fois en 2025. L'ampleur des réductions dépendra de la situation particulière de chaque économie.
Les Philippines devraient procéder à des baisses de 75 points de base, qui s'ajoutent à une réduction cumulée de 75 points de base du taux directeur au cours des trois réunions précédentes. La politique monétaire du pays évolue de manière plus indépendante de celle de la Fed que celle de ses pairs régionaux, car les préoccupations concernant la croissance intérieure et l'inflation prennent le pas sur la banque centrale.
Nous prévoyons une baisse de seulement 25 points de base en Thaïlande, même si les perspectives de l'économie locale sont faibles. Le décaissement de 145 milliards de bahts (4,3 milliards de dollars) de l'année dernière n'a pas réussi à stimuler la consommation, les banques sont prudentes et la forte dépendance du pays à l'égard des exportations le rend vulnérable aux perturbations du commerce mondial.
Parmi les économies qui devraient maintenir leurs taux stables figure la Malaisie, où une croissance robuste s'accompagnera de légères pressions inflationnistes. L'économie tourne à plein régime, ce qui signifie que même si les exportations peuvent souffrir dans un monde où le protectionnisme s'intensifie, la demande intérieure et les flux d'investissement seront en mesure de prendre le relais.
Focus sur l’Inde
Avec un PIB en hausse de 8,2 % au cours de l'exercice 2024, l'Inde a été l'une des économies à la croissance la plus rapide au monde, et elle devrait continuer à se développer à un rythme soutenu cette année, même si plus modéré. Le ralentissement est dû, en partie, à la faiblesse des activités manufacturières, les nouvelles commandes ayant ralenti ces derniers mois.
Le potentiel de croissance de l'Inde reste cependant intact, car le pays bénéficie de plusieurs moteurs structurels qui entraîneront une augmentation du PIB à long terme. Il s'agit notamment d'une démographie favorable, d'une meilleure gouvernance et de secteurs à forte valeur ajoutée qui contribuent à une part plus importante de l'activité économique.
L'inflation indienne devrait légèrement baisser en 2025, soutenue par des précipitations suffisantes et une récolte robuste qui atténuera la pression inflationniste des prix alimentaires. Une guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine pourrait également avoir un effet désinflationniste en Inde, car elle pourrait amener la Chine à rediriger ses exportations moins chères vers d'autres pays.
L'Inde connaît un ralentissement cyclique de son économie. Cependant, une hausse des dépenses publiques est prévue. Le gouvernement indien a récemment dévoilé son budget pour l'exercice 2026, qui devrait stimuler la consommation et l'investissement.
La Reserve Bank of India (RBI) a procédé à une baisse de son taux directeur de 25 points de base en février. Nous prévoyons deux autres baisses de taux de la part de la RBI au cours de ce cycle, l'une en avril et l'autre au second semestre. Cela ramènerait le taux directeur à 5,75 % et, en fin de compte, réduirait le coût du capital pour les particuliers et les entreprises. Au total, le soutien budgétaire et la relance monétaire devraient selon nous contribuer à maintenir la croissance à 6,7 % au cours de l'exercice 26.
Évaluation des perturbations commerciales
Tout au long de 2025, les économies asiatiques devront faire face à des niveaux élevés d’imprévisibilité dans les perspectives commerciales. Une grande partie de l’incertitude provient de la proposition de l’administration américaine actuelle d’imposer des droits de douane à un certain nombre de ses principaux partenaires commerciaux. Les droits de douane sur les importations chinoises, qui ajouteront 10 % aux prélèvements existants, seront maintenus. Même les économies qui ne sont pas directement visées par ces mesures pourraient faire face à une baisse de la demande d’exportation en raison des droits de douane. Les barrières commerciales auront un effet d’entraînement sur l’ensemble des chaînes d’approvisionnement, à mesure que la demande américaine de produits chinois s’affaiblit et que les producteurs chinois réduisent leurs achats d’intrants étrangers et domestiques.
A la recherche du bon équilibre
La baisse de l'inflation permet aux banques centrales asiatiques d'assouplir davantage leur politique monétaire. Mais dans de nombreuses économies, cette marge est limitée par l'évolution de la situation aux États-Unis, qui maintiendra le cycle d'assouplissement à un niveau faible. Il sera essentiel de trouver le bon équilibre entre la demande intérieure et les contraintes extérieures pour que les économies asiatiques puissent croitre avec succès en 2025.
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Pour aller plus loin
- Visitez notre page Markets 360 (en anglais) pour en savoir plus sur les perspectives économiques 2025.
- Ecoutez Isabelle Mateos y Lago, Cheffe Economiste de BNP Paribas, dans le podcast "La Story", Chine: quand le consommateur s'éveillera, publié dans le journal Les Echos.