J’ai été particulièrement fier et enthousiaste quand la Fondation BNP Paribas m’a proposé d’être l’ambassadeur de son nouveau programme Dream Up pour les 3 ans à venir. C’est un honneur. Sur cette période, Dream Up permet à des associations implantées dans 26 pays des 5 continents de donner accès à l’éducation, par la pratique artistique, à des enfants défavorisés. Cela me touche beaucoup, d’une part parce que je trouve cette initiative intelligente et généreuse, et aussi car elle fait directement écho à mon propre parcours. En allant accompagner des ateliers de danse dans ces centres et dans ces écoles, j’ai la chance de leur proposer un langage universel, un langage du corps que tout le monde peut s’approprier quel que soit son âge, sa langue, sa condition, son niveau scolaire et même son handicap.
j’ai la chance de Leur proposer un langage universel, un langage du corps que tout le monde peut s’approprier quel que soit son âge, sa langue, sa condition, son niveau scolaire et même son handicap.
L'enfance d'Abou Lagraa
Etant danseur français d’origine algérienne, il m’a fallu beaucoup de ténacité pour arriver où je suis aujourd’hui. Je suis né en Ardèche de parents algériens, d’une famille musulmane, plus que modeste. J’avais la danse dans le sang depuis l’enfance mais j’ai commencé tard, à 16 ans et demi, sans oser en parler à mon père à qui j’ai longtemps dit que j’allais à l’entraînement de handball… J’étais tellement passionné que je dormais presque en grand écart ! Pendant des années, seule ma mère était complice de ma passion. Jusqu’au jour où il a bien fallu que « j’avoue » puisque j’entrais au Conservatoire national de Danse de Lyon... Quand mes parents sont venus me voir, ça a été pour eux à la fois un choc et une grande fierté que leur fils intègre une école supérieure et une institution si élitiste. Je suis un peu un Billy Elliot algérien d’Annonay !
Sa réussite et la transmission de son savoir au sein du projet Dream Up
L’accomplissement et l’épanouissement par la création artistique évoquent beaucoup de choses pour moi… Et j’ai envie de transmettre cette potentialité aux jeunes que je rencontre, de décloisonner, d’ouvrir des portes, de découvrir des talents partout dans le monde. La danse c’est avant tout un travail acharné mais c’est aussi une histoire de confiance et de chance. Cette confiance on me l’a donnée et donc cette chance je l’ai eue. C’est d’ailleurs pour cela que j’ai appelé ma Compagnie « la Baraka » quand je l’ai créé en 1997. Et puis tout est allé très vite, signe que c’est possible !
En 2009, j’ai reçu le Prix du meilleur danseur international du festival Movimentos de Wolfsburg. Par cette reconnaissance, je suis devenu un exemple pour certains, ce qui est sûrement une bonne chose, même si je n’aime pas qu’on me colle une étiquette à propos de mes origines. J’aime brouiller les pistes et ce n’est pas un hasard si je travaille sur des fusions entre danse classique, hip hop, et danse contemporaine pour renouveler le genre à chacune de mes créations. Depuis 10 ans, la Fondation BNP Paribas a eu un rôle très important dans le développement de mon travail et de cette Compagnie, et c’est tout naturellement que nous continuons notre chemin ensemble.
C’est aussi une grande joie pour moi de montrer aux enfants et adolescents bénéficiaires de Dream Up que par l’art, on peut devenir quelqu’un, développer sa personnalité, rencontrer des gens, se cultiver, s’éduquer et se forger un mental qui va permettre d’accéder à ce qui est impossible ou impensable à priori, et je sais de quoi je parle.
par l’art, on peut devenir quelqu’un, développer sa personnalité, rencontrer des gens, se cultiver, s’éduquer et se forger un mental
La danse, un langage universel
En rencontrant les jeunes de Dream Up, j’aimerais leur donner la confiance en soi dont on a besoin pour s’épanouir et oser aller vers ce que l’on aime faire. La danse, pour moi, est un formidable vecteur de transmission et peut faire comprendre aux jeunes, y compris quand on ne parle pas leur langue, qu’ils ont une place, une parole dans le monde, un moyen de s’exprimer, d’exister, malgré tout. Certains des jeunes bénéficiaires ont déjà dansé, d’autres pas. Faire danser pour la première fois des enfants et des jeunes, les emmener dans la danse, j’aime beaucoup ça. Je le fais avec ma Compagnie depuis des années, cela demande de la finesse et du tact, de la psychologie. La psychologie, en danse, c’est un des piliers. Avec le travail bien sûr !
Avec Dream Up, il ne s’agit pas de distribuer des tee-shirts à des gamins, non, c’est une action sur la durée et directement vers l’humain qui en a besoin et je me sens totalement en phase avec ça. Que l’argent serve aux minorités et aux empêchés, que les associations qui s’y emploient soient mises sous les projecteurs, j’aimerais que cela donne des idées aux politiques, que cela réveille les consciences. Et pourquoi pas les vocations !