• Finance durable

COP16 Biodiversité : que retenir pour le secteur financier ?

Publié le 21.11.2024

La 16ème réunion de la Conférence des Parties (COP16) à la Convention sur la Diversité Biologique (CDB) s'est déroulée du 21 octobre au 1er novembre 2024 à Cali, en Colombie. Cet événement majeur pour la biodiversité a lieu tous les deux ans, depuis l’adoption de la CDB lors du Sommet de la Terre à Rio de Janeiro en 1992. L’enjeu, cette année, pour les 196 Etats signataires : faire un état des lieux de la mise en œuvre du Cadre mondial de la biodiversité (Global biodiversity framework ou GBF en anglais) adopté lors de la COP15 à Montréal, en décembre 2022, et continuer de l’impulser en s’accordant sur divers points techniques, mais aussi financiers.

Un sommet sur le thème de « la paix avec la nature » 


La Présidente de la COP16, Susana Muhamad, ministre de l’Environnement en Colombie, a rappelé l’urgence de faire la paix avec la nature et de passer des mots à l’action. La première cause de l’effondrement rapide et massif de la biodiversité est liée aux activités humaines. L'appel à la "paix avec la nature", signifie arrêter d’abîmer la nature à travers nos activités et donc changer la façon dont nous consommons, afin de réduire nos impacts et notre exposition à l’utilisation du capital naturel. C’est aussi reconnaître que la nature est source de vie, de résilience face aux défis du changement climatique, et donc un facteur de paix. La tenue de cette COP en Colombie permettait aussi de mettre l’accent sur les enjeux des pays d’Amérique Latine, à la biodiversité très riche et très menacée, ainsi que des pays du Sud global plus largement.

Quelles implications pour la COP16 ? Cela signifie que les pays signataires doivent présenter des plans clairs qui alignent les actions nationales sur tous les objectifs du Cadre mondial, reliant l’action sur la nature à l’action climatique, reconnaissant l’importance d’une transition écologique socialement juste, y compris le rôle des peuples autochtones et des communautés locales comme acteurs et bénéficiaires de la préservation et la gestion durable de la biodiversité. Il s’agit aussi pour les pays de se donner les moyens de l’action - via la mobilisation de financements publics, la réforme des incitatifs économiques nuisibles à la nature, la mobilisation de la finance privée, et, pour les pays le nécessitant, l’aide au développement. Pour rappel, le Cadre mondial a fixé 4 objectifs à 2050 et 23 cibles à atteindre d’ici 2030 pour stopper et inverser la perte de biodiversité à travers la restauration et la protection des écosystèmes et aboutir à une vision d’une société « en harmonie avec la nature ».  

La COP en pratique 

Voulant être les pionniers d’une « COP de la population », les organisateurs colombiens ont aménagé une zone verte ouverte au public afin d’encourager la réflexion et la participation citoyenne sur la recherche de solutions pour la protection et la conservation de la biodiversité biologique, à travers la mise en place de débats, concerts et stands. Comme pour les éditions précédentes, l’entrée dans la zone bleue était réservée aux délégations officielles des pays membres, aux groupes d’observateurs accrédités (notamment organisations de jeunesse, communautés locales, peuples autochtones, acteurs de la recherche scientifique, secteur privé et financier), aux représentants des organisations multilatérales et aux médias accrédités. Elle était le lieu des négociations officielles mais comportait aussi un riche programme d’évènements parallèles présentant de très nombreux travaux et initiatives appuyant le GBF. 

La délégation de BNP Paribas sur place était constituée d’experts de la Direction de l’Engagement d’entreprise –  Camille Maclet, Expert Biodiversité, Antoine Sire, Conseiller pour l’économie à impact et l’inclusion sociale, Sébastien Soleille, Responsable Transition énergétique et Environnement – et de représentants de BNP Paribas aux Amériques, Maria Camila Bernal, Responsable Finance durable et ESG, CIB Hispanic LATAM, Hervé Duteil, Chief Sustainability Officer, Amériques et Jorge Valderrama, Responsable de Territoire Colombie. Ces 6 représentants ont été invités à prendre la parole lors de 24 événements, 15 dans la zone verte et 9 dans la zone bleue. 


Le rôle crucial du secteur financier  

Le GBF met un accent particulier sur l’importance de mobiliser les financements pour la préservation de la nature. Lors de la COP15, les parties de la CDB s'étaient données pour objectif de mobiliser 200 milliards de dollars de financement annuel alloué à la protection de la biodiversité d'ici à 2030, et réformer 500 milliards de dollars d’incitatifs économiques néfastes pour la biodiversité. Parmi les solutions de financement identifiées dans la cible 19 à 2030 du GBF, on retrouve l'investissement public, l'aide au développement, les partenariats publics-privés et modèles de financement mixtes, appelés aussi "blended finance", des solutions innovantes telles que les paiements pour services écosystémiques et les crédits pour la biodiversité. À la COP16, nous avons vu un accent particulier sur les solutions de finance mixte, conçues pour soutenir les objectifs de développement durable (ODD) dans les pays en développement, impliquant tous les acteurs, publics et privés comme des gouvernements, des institutions de financement du développement, des banques privées, ou encore des entreprises. Les crédits biodiversité étaient aussi un sujet clé avec la présentation des travaux du panel international sur les crédits biodiversité (IAPB) appuyé par les gouvernements français et britannique. 

Le Groupe est intervenu lors d’une rencontre sur le lancement de Blue Finance, partenariat entre BNP Paribas et Blue Alliance, une facilité de crédit réalisée par l’équipe d’investissement à impact du Groupe. Cette structure a été créée pour financer le développement d’activités économiques et éco-responsables avec des communautés locales dans quatre pays (Indonésie, Philippines, Cap Vert et Tanzanie) dans le but de générer de nouvelles sources de revenus pour les aires marines protégées gérées par Blue Alliance dans ces régions. Ce financement s’inscrit dans l’enveloppe d'investissement pour compte propre du Groupe de 55 millions d’euros dédiée au capital naturel, gérée conjointement par la RSE Groupe et BNP Paribas Asset Management.

En outre, les représentants de BNP Paribas sont intervenus dans diverses conférences relatives aux partenariats publics-privés et à la mobilisation de la finance privée pour la préservation et la restauration de la nature – aux côtés d’entreprises, de banques de développement et d’initiatives de marché, en plénière de journées officielles comme la journée “Finance et Biodiversité” et la “Journée Océan” organisée par le Secrétariat de la CDB. Ceci était l’occasion de réitérer l’ambition du Groupe d’être un acteur du financement de la transition écologique, avec comme objectif d’avoir atteint d’ici 2025 4 milliards d'euros de soutien de nos clients dont les activités contribuent à la protection de la biodiversité terrestre et marine. Cet objectif a été dépassé à l'issue de l'exercice 2023, avec un montant de 4,3 milliards d'euros. 

Le secteur financier a un rôle crucial dans le financement de l’innovation. Le fonds BNP Paribas Solar Impulse a atteint en juillet 2024 son premier objectif de lever 150 millions d’euros pour soutenir des start-ups innovantes et engagées dans la transition écologique. Parmi elles, NatureMetrics, une « naturetech » utilisant l'ADN environnemental pour mesurer et surveiller l'impact humain sur la nature. A l’aide de sa plate-forme numérique, cette technologie fournit aux entreprises des données précises pour gérer leurs impacts sur les écosystèmes à grande échelle. 

Des résultats en demi-teinte 

Plusieurs accords importants ont été trouvés à Cali, parmi lesquels :  

  • La création du « fonds Cali » sous l’égide de l’ONU qui pourra être abondé par les entreprises faisant des bénéfices générés par la numérisation des données génétiques de plantes ou d’animaux issus de pays en développement. Ces données sont utilisées dans les secteurs agro-alimentaire, cosmétique et pharmaceutique notamment. L’objectif de la création de ce fonds est de partager équitablement les ressources financières collectées entre les entreprises et les pays en développement.   
  • La reconnaissance du rôle des peuples indigènes et des communautés locales dans la protection de la biodiversité, avec l’adoption de l'article 8J et la création d’un organe de représentation officiel et permanent dans les négociations onusiennes sur la biodiversité.  
  • L’importance de l'océan a été soulignée dans des résolutions sur la biodiversité marine, un accord a été notamment été trouvé sur les modalités de création des aires marines protégées. 

Cependant, la COP16 n'a pas abouti à un consensus sur les modalités relatives à un mécanisme multilatéral de financement de la conservation et de la restauration de la nature dans le Sud, via lequel seraient mobilisés les 25 milliards de dollars par an à 2025 et 30 milliards de dollars par an à 2030 d’aide au développement fléchée vers la conservation, la restauration et la gestion durable de la biodiversité. Les Parties de la CDB n'ont pas non plus réussi à s'accorder sur la procédure d'évaluation des actions mises en œuvre pour respecter l'Accord de Kunming-Montréal. À la clôture de la COP16, seulement 44 pays (dont la France) avaient déposé leurs stratégies ou plans d'action nationaux (NSAP) sur un total de 119.

Affaire à suivre donc… La prochaine COP se déroulera en 2026 en Arménie, d’ici là deux COP sur le climat auront eu lieu, qui abordent la biodiversité sous l’angle du réchauffement climatique : la COP29 en Azerbaïdjan, qui a commencé le 11 novembre et se terminera le 22, et la COP30, très attendue en novembre 2025 au Brésil, pays chargé d’enjeux naturels, économiques et sociaux relatifs au climat et à la biodiversité, et pays d’adoption de la Convention sur la Diversité Biologique et de la Convention Cadre sur le Changement Climatique au sommet de Rio en 1992.  


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