- Le discours de Mario Draghi du 26 juillet 2012 avait nettement contribué à calmer les marchés
- Aujourd’hui comment lancer le processus de normalisation de la politique monétaire sans perturbation majeure ?
Il suffit d’aller sur la Toile pour constater que le fameux discours de Mario Draghi à Londres, le 26 juillet 2012, est commémoré, pour ne pas dire célébré, chaque année. Plusieurs facteurs expliquent l’admiration durable qu’il a suscitée. D’abord, une raison pratique : le message était percutant, donc facile à mémoriser. Ensuite, le timing était particulièrement bien choisi avec une aggravation exponentielle de la nervosité au cours des semaines et des jours précédents. Enfin et surtout, il proposait d’« ouvrir les vannes », promettant de faire tout ce qu’il faudrait. La BCE a communiqué sur son plan d’action après la réunion du Conseil des gouverneurs du 6 septembre, au cours de laquelle le programme OMT (Outright Monetary Transactions) a vu le jour. Ce programme devait permettre de remédier à de graves distorsions sur les marchés obligataires en achetant des obligations souveraines ayant une maturité de un an à trois ans, sans limite quantitative ex ante mais sous réserve du respect d’une « conditionnalité stricte et efficace attachée à un programme approprié du Fonds européen de stabilité financière/Mécanisme européen de stabilité (FESF/MES) ».
La contraction considérable des spreads périphériques par rapport au Bund qui a suivi s’explique par la conviction, d’une part, que les pays concernés se soumettraient à cette conditionnalité et, d’autre part, que la BCE tiendrait ses promesses. La crédibilité était telle que le programme OMT n’a dû être utilisé. Le discours a suffi à calmer les marchés, mais sans remédier à des déséquilibres économiques persistants (inquiétudes relatives à la déflation, morcellement des marchés du crédit bancaire). De nouvelles mesures ont dû être prises : un taux de rémunération des dépôts négatif et l’assouplissement quantitatif conduisant à une borne inférieure effective des taux d’intérêt nominaux bien en deçà de zéro.
La zone euro est en train de réaliser plusieurs années de croissance supérieure au potentiel, d’où la perspective d’une légère remontée de l’inflation tendancielle et d’un début de normalisation de la politique monétaire. Eu égard à l’influence antérieure de la BCE sur les marchés financiers, en particulier, ceux des obligations souveraines et des obligations d’entreprise, la normalisation sera un exercice délicat. Pour paraphraser le discours de Londres, les investisseurs auraient bien envie d’entendre, cette fois : « concernant la normalisation, croyez-moi, le processus sera suffisamment lent » ...