Les récifs coralliens abritent la plus grande biodiversité marine et rendent de nombreux services aux hommes : pêche, tourisme, protection des côtes. Plus de 500 millions de personnes en dépendent pour leur subsistance. Problème : ces oasis de vie sont extrêmement sensibles aux modifications de leur environnement (réchauffement, acidification, pollution, surpêche) et on assiste actuellement à un blanchissement massif et global des récifs, signe d’une rupture de la symbiose entre le corail et ses micro-algues produite par des températures élevées.
En 2016, 93% de la grande barrière de corail a ainsi blanchi et environ 80% des coraux de Kiribati, Samoa, Fidji et Tonga seraient déjà morts. Depuis mars 2017, un nouvel épisode de blanchissement est en cours. « C’est la première fois que deux épisodes de blanchissement massif se répètent sur deux années consécutives », souligne Valeriano Parravicini, enseignant chercheur à l’École Pratique des Hautes Etudes, à Perpignan. Or, si les mécanismes physiologiques de ces phénomènes sont désormais bien connus, l’impact de ce blanchissement sur le fonctionnement des récifs et les services qu’ils rendent à l’homme restent encore mal estimés. D’où ce projet de recherche, mené par Valeriano Parravicini en collaboration avec des chercheurs issus de six laboratoires français, anglais, américains et australiens, qui vise à évaluer les différents services rendus par les poissons des récifs et estimer l’impact à long terme du phénomène de blanchissement.
Plus de 500 millions de personnes dépendent des coraux pour vivre.
“ Si l’on connaît bien les raisons de la mortalité des coraux, l’impact sur les services qu’ils rendent à l’homme restent encore méconnu. ”
Centre de recherches insulaires et observatoires de l’environnement (EPHE/CNRS/UPVD/PSL)
Évaluation exhaustive
« Nous souhaitons étudier trois types de services rendus par les poissons des récifs coralliens, explique Valeriano Parravicini. Le service d’approvisionnement, via les espèces comestibles ; le service culturel, via certaines espèces connues pour leur valeurs esthétiques et récréatives ; et le service de soutien, c’est-à dire les processus nécessaires à l’écosystème, via par exemple l’étude des poissons herbivores, qui permettent notamment d’éviter la colonisation des coraux par les algues, ou encore à travers l’étude des espèces qui participent au cycle du carbone par ingestion de carbonate ». La première étape du projet consistera à évaluer le rôle de chaque espèce de poissons coralliens dans ces différents services écologiques et quantifier leur participation. Quelles espèces contribuent le plus à quel service ? Existe-t-il des conflits entre les différents services ?
Une deuxième étape consistera à se plonger dans les bases de données existantes sur l’abondance de ces différentes espèces dans plusieurs stations d’observation du Pacifique insulaire. « Nous bénéficions de séries temporelles de plus de trente ans dans les sites du Pacifique suivi par le CRIOBE, le Centre de Recherches Insulaires et Observatoire de l’Environnement, notamment avec la station de Moorea », précise le chercheur. Cette analyse rétrospective permettra d’apprécier les évolutions de l’abondance de ces espèces en fonction des paramètres environnementaux, comme la température de l’eau ou la disponibilité d’habitat.
Nous bénéficions de séries temporelles de plus de trente ans dans les sites du Pacifique suivi par le CRIOBE, notamment avec la station de Moorea.
Cartes de risque du futur
Enfin, la dernière étape consistera à faire des évaluations quant à l’avenir. En se basant sur les différents scénarios de réchauffement et en s’appuyant sur les modèles qui mettent en relation les anomalies de température et la survenue d’épisodes de blanchissement, il s’agira d’établir des cartes des risques pour le futur. Quelles espèces seront impactées, en quelles proportions ? Et quelles seront les conséquences sur les trois différents types de services étudiés ? Ces données seront précieuses pour évaluer l’impact du réchauffement climatique en milieu insulaire, et plus globalement, sur l’ensemble des populations qui dépendent des récifs coralliens. Car une chose est sûre : lorsque les coraux meurent, leurs services disparaissent avec eux. Or, si rien n’est fait pour pallier les menaces locales et globales qui pèsent sur les récifs, ils pourraient tout bonnement diminuer jusqu’à ne plus pouvoir soutenir les populations humaines d’ici 2050, indiquait récemment un rapport du World Ressource Institute.
lorsque les coraux meurent, leurs services disparaissent avec eux.
La Fondation BNP Paribas invite les Youtubeurs
En plein milieu des coraux à Tahiti
Dr. Nozman, Youtubeur scientifique français, a suivi l’équipe scientifique de REEF SERVICES à Tahiti et Moorea et raconte la mise en place et le travail de recherche du projet.
Corals reefs aren't as doomed as you think
Sally Le Page, biologiste anglaise et humoriste sur YouTube, a également suivi le projet REEF SERVICES. Découvrez son reportage vidéo sur les enjeux liés aux récifs coralliens (en anglais).