Une voiture peut en cacher une autre
Une voiture peut en cacher une autre ! Malgré les apparences, certains véhicules qui circulent dans les rues de San Francisco, de Phoenix en Arizona ou encore à Pékin n’ont pas toujours de chauffeur au volant : ces villes font partie des premières à avoir autorisé la circulation de robots-taxis. Des véhicules autonomes dont la conduite, entièrement automatisée, se fait donc sans conducteur. Ces véhicules atteignent le niveau 5, soit le plus haut niveau d’autonomie (lire encadré ci-dessous), grâce à des capteurs et à l’intelligence artificielle qui permettent de détecter l’environnement, de fusionner les informations obtenues pour l’analyser, de décider d’une action et de la mettre en œuvre.
Niveaux d’autonomie en Europe
L’Europe classe les voitures commercialisées en cinq niveaux d’autonomie.
Aux niveaux 1 et 2, le logiciel embarqué freine, accélère ou maintient la voiture dans sa voie, mais il se contente d’assister le conducteur qui reste seul responsable.
La véritable autonomie débute au niveau 3, où une partie de la responsabilité est confiée au logiciel (et donc indirectement au constructeur), pour doubler une voiture sur l’autoroute par exemple. Le conducteur doit néanmoins être prêt à reprendre le contrôle en cas d’alerte lancée par le véhicule et c’est toujours le cas au niveau 4.
Au niveau 5, plus de conducteur, la voiture est entièrement autonome.
Honda est le premier constructeur à commercialiser un système de conduite partiellement autonome de niveau 3 au Japon en 2021, suivi par Mercedes-Benz en Allemagne la même année, ainsi qu'au Nevada et en Californie en 2023 — et bientôt BMW en Allemagne cette année.
Si plusieurs opérateurs, comme Waymo (Google / Alphabet), Zoox (Amazon) ou Nuro ont franchi le pas, la plupart des constructeurs automobiles commercialisent des véhicules autonomes de niveau 1, 2, voire 3, au moyen de l’intelligence artificielle. Des bénéfices déjà immenses pour l’automobile et l’expérience des usagers. Depuis septembre 2022, l’Allemagne par exemple, autorise les « véhicules à délégation de conduite » correspondant au niveau 3 : ils peuvent circuler de façon semi-autonome notamment sur autoroute, dans les bouchons et dans les parkings. Après Honda et sa Legend Hybrid EX en 2011 autorisée au Japon, l’allemand Mercedes-Benz a été autorisé en Allemagne, en Chine et en Californie à commercialiser ses modèles de niveau 3.
À l'heure actuelle, les voitures partiellement autonomes de niveau 2 et de niveau 3 sont les plus importantes sur le marché, tandis que les niveaux 4 et 5 (tels que mis à l'échelle par la SAE International) devraient être plus largement acceptés d'ici 2030.
(Source : mordorintelligence.com, autonomous-driverless-cars-market-potential-estimation)
L’IA au bénéfice de la sécurité
Grâce à l’intelligence artificielle, les véhicules connectés, sans être 100 % autonomes, permettent d’ores et déjà de renforcer sensiblement la sécurité à bord. L’IA dispose d’une formidable capacité d’absorption et d’exploitation de données issues de l’intérieur comme de l’extérieur du véhicule. Elle apporte des solutions de surveillance permanente, grâce à des capteurs et des caméras qui assistent le conducteur. Et l’IA est au cœur des systèmes d'aide à la conduite avancés (ADAS) : freinage automatique, avertisseur de collision, régulation de vitesse, détection de déviation de la trajectoire… La plupart des constructeurs ont également introduit dans leurs véhicules des détecteurs de fatigue qui analysent la conduite au volant et avertissent le conducteur au premier signe d’une baisse de concentration.
Le fait de pouvoir anticiper ce qu’il se passe dans et autour du véhicule, avec des techniques comme le freinage d’urgence, permet de réduire de manière significative les accidents, ce que recherchent les constructeurs automobiles. Toutes ces technologies sont de plus en plus déployées, y compris dans des véhicules standards.
Matthieu Soulé, Directeur du BNP Paribas C. Lab Americas.
Une gestion optimisée des flottes automobiles
Mais ce n’est pas tout. L’IA joue également un rôle important en matière de maintenance prédictive. Grâce à l’analyse en temps réel de cette technologie embarquée, l’IA peut anticiper les défaillances mécaniques, en détectant des variations de température ou de pression, par exemple, et suggérer le remplacement de certains composants. En maintenant le véhicule dans des conditions optimales, l’IA concourt à renforcer la sécurité à bord. Cette maintenance prédictive devient l’indispensable de la gestion de flottes automobiles. L’IA permet en effet de traiter une multitude de données sur les composants du véhicule – et leur vétusté potentielle – mais aussi sur leur état général (performance, efficacité ou encore productivité des véhicules.)
« Le traitement de millions de données par l’IA apporte aux gestionnaires de flottes une source d’optimisation des coûts et d’informations utiles sur la consommation, l’usage, etc. », analyse Matthieu Soulé. Arval, l’un des principaux acteurs de la location longue durée et spécialiste des solutions de mobilité, vient à ce titre de dépasser les 100 000 véhicules connectés grâce aux données reçues directement via les constructeurs automobiles. Ces véhicules font partie des 650 000 véhicules connectés de la flotte d’Arval grâce à la solution Arval Connect. La filiale de BNP Paribas ambitionne de connecter 80 % de sa flotte d’ici 2025. Un moyen d’organiser des opérations de maintenance proactives, d’optimiser la gestion de la flotte en réduisant les temps d’immobilisation.
Volkswagen a annoncé son ambition de dépenser plus de 122 milliards d’euros dans l’électrification et la digitalisation, entre 2023 et 2027 ; en 2023, Honda et Sony ont lancé Afeela, marque de mobilité avec un prototype zéro-émissions ultra-connecté, doté de 45 capteurs - LiDARs (Light detection and ranging), caméras… - répartis entre l’extérieur et l’intérieur. Au final, le prototype propose une plateforme numérique qui offre aides à la conduite, au pilotage semi-autonome et aux connexions à différents réseaux (entre véhicules, entre véhicules et infrastructures…) via la 5G notamment.
Plus récemment, le constructeur français Stellantis a annoncé un partenariat avec Amazon pour concevoir les logiciels de son « smart cockpit », une plateforme électronique qui sera intégrée aux véhicules des 14 marques du groupe. Une façon de prolonger la stratégie software de Stellantis définie dans le plan Dare Forward 2030 qui ambitionne de développer des produits de mobilité intelligents et d’améliorer l’expérience client grâce à la personnalisation des fonctionnalités.
Tous les constructeurs consacrent des investissements massifs dans le « software », et les partenariats entre les constructeurs et les entreprises de la tech sont désormais monnaie courante.
Guillaume Rio, Directeur de projet, Veille et Acculturation, Banque Commerciale en France, BNP Paribas.
IA et durabilité : une relation de long-terme ?
L’impact de l’IA sur l’automobile va au-delà de la sécurité et de la commodité ; elle façonne également l’avenir de la mobilité durable. A ce titre, l’IA permet d’optimiser les trajets des véhicules connectés et de contribuer à fluidifier le trafic, de contrôler le remplissage de véhicules autonomes, de conseiller sur l’éco conduite, de se garer, de se détendre... Grâce à l’ajustement dynamique des paramètres, les logiciels embarqués mesurent et conseillent pour réduire la consommation de carburant et des émissions de CO2.
De l’expérience au volant à l’amélioration de la sécurité à bord, en passant par l’optimisation des trajets, l’IA est loin d’avoir fini de transporter l’industrie automobile vers de nouveaux mondes.