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Hydrogène vert, comment le rendre plus accessible et faciliter son financement ?

Alors que l’hydrogène vert se développe à travers le monde et s’impose comme une des réponses prometteuses aux enjeux de la transition énergétique, de nombreux défis restent encore à relever pour le produire, le distribuer et l’utiliser à grande échelle. Pour cela, aux côtés des industriels, les banques et les investisseurs ont un rôle clé à jouer.

3 points clés pour le développement de l'hydrogène vert :

  • L'hydrogène vert pourrait contribuer à relever certains des plus grands défis de la décarbonation dans des secteurs aux émissions difficiles à réduire, tels que la fabrication de ciment, les transports de marchandises et le raffinage.
  • Sa production est toutefois coûteuse et ne se prête pas facilement au financement bancaire.
  • Les progrès technologiques, les incitations fiscales et les mesures prises par les producteurs pourraient rendre la production plus économique et plus facilement finançable.

Produire de l'hydrogène en limitant les émissions de carbone. 

L'hydrogène est utilisé depuis plus d'un siècle pour la production de carburants alternatifs, de matières premières et d'engrais, ainsi que dans le raffinage du pétrole brut. Plus récemment, il s'est avéré être un agent de décarbonisation efficace dans les activités industrielles et les secteurs dans lesquels l'électrification n'a pour le moment qu'une application limitée, tels que les raffineries, la construction ou encore les transports.

L'hydrogène est la substance la plus abondante de l'univers, mais les méthodes de production ont - paradoxalement - souvent impliqué l'utilisation de plus de combustibles fossiles que l'utilisation de l'hydrogène lui-même ne permettrait d'économiser. Cependant, il est possible de produire de l'hydrogène en abondance tout en limitant les émissions de carbone.

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L'hydrogène vert, "le carburant de l'avenir"

Souvent appelé "le couteau suisse de la décarbonation" (lien vers un article en anglais publié par BNP Paribas Asset Management), l'hydrogène vert provient de l'électrolyse de l'eau alimentée par des sources d'énergie renouvelables telles que l’éolien, le solaire et l’hydroélectrique. Ce processus ne produisant aucun sous-produit nocif, l'hydrogène vert a le potentiel de fournir la forme d'énergie la plus propre qui puisse être utilisée pour alimenter ensuite voitures, navires, avions et habitations. Il pourrait également contribuer à accélérer la décarbonation dans des secteurs aux émissions difficiles à réduire, tels que la production de ciment et d'engrais et le raffinage, secteurs pour lesquels où il n'existe actuellement pas d'autres solutions satisfaisantes.

Avec l'évolution des technologies de production, de stockage et de transport de l'hydrogène évoluent, l'hydrogène vert deviendra plus accessible pour la production d'électricité et les transports. Les applications potentielles sont très nombreuses – dans la production d'électricité hors réseau, dans les piles à combustible des véhicules (des voitures aux camions en passant par les autobus) ou comme source de chaleur pour la fabrication du ciment et de l'acier.

A travers le monde, de grands projets ont déjà mis en évidence le potentiel de l'hydrogène vert en tant que source alternative d'énergie durable pour aider à réduire les émissions de carbone. Citons par exemple le projet d'hydrogène vert de NEOM en Arabie saoudite, qui a bénéficié d'un financement de 8,4 milliards de dollars US de la part d'un consortium de banques, dont BNP Paribas ; l'annonce par AES d'une usine d'hydrogène vert de 4 milliards de dollars US au Texas ; et le complexe H2 Magallanes - le plus grand projet d'hydrogène vert du Chili à ce jour - qui vise à produire 25 gigawatts d'hydrogène vert d'ici à 2030.

Baisser les coûts de production de l'hydrogène vert

Actuellement, l'hydrogène vert coûte jusqu'à trois fois plus cher à produire que celui issu des autres méthodes de production, et l'accès aux énergies renouvelables est essentiel pour le produire à grande échelle.

Dans ce contexte, les États-Unis sont en passe de devenir un leader mondial de l'hydrogène faiblement carboné car le pays dispose d’énergie renouvelable en quantité, et s’est doté d’un cadre réglementaire incitatif.  Ainsi, la loi sur l'investissement dans les infrastructures et les emplois (Infrastructure Investment and Jobs Act, IIJA), a alloué 8 milliards de dollars sur quatre ans au développement de centres régionaux de production d'hydrogène propre à grande échelle, et la loi sur la réduction de l'inflation (Inflation Reduction Act, IRA) prévoit des crédits d'impôt pour encourager la croissance de l'offre d'hydrogène à faible teneur en carbone.

D'autres pays du continent développent également leur production d'hydrogène - et, plus largement, d'énergie renouvelable - afin de se positionner en tant qu'exportateurs majeurs d'hydrogène vert à faible coût. En particulier, le Brésil et le Chili sont en train de devenir des acteurs majeurs de l'hydrogène vert, en raison de la faiblesse des coûts de l'énergie solaire et éolienne.

« Le crédit d’impôt issu de l’IRA soutient fortement le développement de l'hydrogène aux Etats-Unis »
Ravina Advani, responsable du Low-Carbon Transition Group chez BNP Paribas Americas. 

Il convient toutefois de ne pas minimiser les difficultés liées à la complexité du stockage et du transport de l'hydrogène, ainsi qu’à l'absence de réglementation définitive. A ce titre, des directives supplémentaires importantes sur les transferts de crédit ont été publiées en juin 2023 et devraient entraîner une augmentation des transactions de crédit d'impôt.

« De nombreux clients se tournent maintenant vers les États-Unis en raison de l'adoption de l'IRA et investissent dans ce marché», ajoute Ravina Advani. « Le crédit d'impôt rend les projets liés à l'hydrogène beaucoup plus économiques et contribuera à stimuler la croissance du marché »

Concrètement, l'IRA prévoit un crédit d'impôt de 3 dollars par kilogramme produit, ce qui ramène le coût moyen de la production d'hydrogène vert aux États-Unis à 2 dollars par kilogramme cette année, et probablement à zéro d'ici à 2030 (lien vers un article en anglais publié par S&P Global). D'ici la fin de la décennie, les États-Unis pourraient ainsi devenir le producteur d'hydrogène à faible teneur en carbone le moins cher du monde.

Les incitations, tant du côté de l'offre que de la demande, seront précieuses.

« Les financements et les crédits d'impôt rendent la technologie plus économique, mais pour qu'elle soit viable, des accords d'achat sont également nécessaires », explique Ravina Advani.  « Si vous prenez de l'hydrogène et que vous le convertissez en méthanol ou en ammoniac vert, il n'existe pas de cotations mondiales pour cela, et les clients ont donc besoin d'un accord d'achat. La particularité de l'hydrogène est qu'il ne s'agit pas d'un secteur comme celui de l'électricité, où, si un contrat d'achat tombe à l'eau, vous pouvez vous tourner vers le marché au comptant, plus liquide. »

Par ailleurs, à mesure que les acteurs plus importants du secteur de l'énergie augmentent leurs investissements dans l'hydrogène vert, les technologies telles que l'électrolyse pour la production finiront par devenir plus économiques. Les principaux producteurs américains de pétrole et de gaz, les services publics et les fonds d'infrastructure commencent déjà à investir dans ce domaine.

Comment faciliter le financement de l'hydrogène vert ?

Le financement est de toute évidence un aspect essentiel pour généraliser l’hydrogène vert. Pourtant, aux États-Unis, les projets d'hydrogène vert susceptibles de trouver un financement sont actuellement peu nombreux, principalement en raison de la complexité de la technologie et de la nécessité de conclure en amont des accords d'achat.

Les industriels à la recherche d'un financement bancaire pour des projets d'énergie et d'infrastructure alimentés à l'hydrogène devraient donc prendre en compte les éléments suivants :

  • L'emplacement : La plupart des régions où de grands projets d'hydrogène à faible teneur en carbone voient le jour (comme aux États-Unis, en Amérique latine et en Europe) disposent d'abondantes ressources éoliennes et solaires et ont déjà mis en place une importante production d'énergie renouvelable ainsi qu'une infrastructure industrielle compatible.
  • La construction : Existe-t-il un contrat d'ingénierie, de fourniture des équipement et de construction, ou un accord avec autre partenaire ayant de l'expérience et des antécédents réussis ?
  • Les obligations contractuelles : Le contrat relatif au projet d'énergie ou d'infrastructure résiste-t-il à l'examen des banques ? Qui assure la gestion des actifs ? Les sites du projet ont-ils fait l'objet d'un contrôle préalable approprié ? Comment prendre en compte le risque projet par projet dans la chaîne de valeur de l'hydrogène vert (étant donné que l'énergie renouvelable doit être associée à un électrolyseur et transférée ensuite dans un mécanisme de stockage ou de transport) ?
  • Le soutien de la demande : Comment inciter les acheteurs à acheter de l'hydrogène vert alors qu'il existe des alternatives moins chères ? Comment les acheteurs peuvent-ils être incités à acheter de l'hydrogène vert ? Y aurait-il une taxe carbone, par exemple ?
Notons qu'en l'absence d'un accord ou d’un contrat d'achat, il pourrait être difficile d'obtenir un financement. A noter que la durée de l'accord doit être suffisamment longue pour atténuer le risque, et celui-ci doit également être conclu avec un partenaire fiable. 

« La conclusion d'accords d’achat sera un facteur déterminant pour l'avancement des projets, et nous constatons que nos clients se concentrent largement sur ces accords commerciaux », explique Aashish Mohan, Co-responsable énergie, ressources et infrastructure chez BNP Paribas Americas. 

« L'IRA aborde l'aspect de l'offre, mais les incitations à la demande pour que les utilisateurs se procurent de l'hydrogène constitueront la prochaine étape cruciale. »

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Aashish Mohan, Co-responsable énergie, ressources et infrastructure chez BNP Paribas Americas

Quel rôle pour les banques dans le développement de l'hydrogène à faible teneur en carbone ?

L'hydrogène vert est l'ingrédient manquant qui pourrait aider à décarboner de nombreuses industries fortement émettrices de CO2, et le développement d'une économie à faible intensité carbone passe nécessairement par des services de financement et de conseil. A ce titre, les banques peuvent jouer un rôle et fournir des conseils sur la gestion des risques, les cadres réglementaires locaux et la mobilisation de capitaux par le biais de la dette, du capital-risque et d’émissions d’actions.

Cependant, pour que l'utilisation de l'hydrogène vert prenne de l'ampleur, tous les éléments de la chaîne de valeur - de l'infrastructure et du transport au stockage et aux équipements industriels associés- doivent être réunis. Les incitations fiscales, les investissements et les progrès technologiques poussent l'hydrogène vert dans cette direction, et les industriels à la recherche de financements devront prendre en compte de nombreux paramètres, logistiques, financiers et technologiques.

A propos du Low Carbon Transition Group de BNP Paribas

Le Low-Carbon Transition Group de BNP Paribas (lien vers la page de présentation en anglais) est dédié au soutien de ses clients entreprises et institutionnels à travers le monde, en vue d’accélérer leur transition vers une économie durable et à faible émission de carbone.

S'appuyant sur son leadership dans les marchés de capitaux et la finance durable, il réunit plus de 250 experts pour accompagner les clients sur des solutions ciblées de conseil et de financement en matière de développement durable à travers les régions et les lignes de métiers, avec des domaines d'expertise tels que l'énergie propre, la mobilité et les solutions environnementales.

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